基本説明
Introduction Par sa durée exceptionnelle, son ampleur et ses spécificités, le « mouvement des gilets jaunes », dont la mobilisation commence à l'automne 2018, a marqué notre histoire sociale contemporaine. S'il a connu sa plus forte intensité entre novembre 2018 et février-mars 2019, le mouvement s'est poursuivi pour une bonne partie des mobilisés au moins jusqu'à la pandémie de Covid-19 et aux mesures de confinement de mars 2020. On peut estimer aujourd'hui à plus de 3 millions le nombre de personnes qui ont participé au moins une fois à une action des gilets jaunes en se rendant sur un rond-point ou rejoignant les cortèges d'une manifestation1. Au moment de l'écriture de cet ouvrage, près de cinq années après le début du mouvement, plusieurs collectifs de gilets jaunes, partout sur le territoire, sont encore mobilisés, se réunissent régulièrement et participent à différents mouvements de contestation, comme le mouvement d'opposition à la réforme des retraites de début 2023. Ainsi que l'ont montré plusieurs enquêtes, le mouvement des gilets jaunes est marqué par un renouvellement des pratiques contestataires qui tient largement aux caractéristiques de ses acteurs. Près de la moitié de celles et ceux qui occupent les ronds-points à partir du 17 novembre 2018 pour protester contre une nouvelle taxe sur l'essence n'ont pas de passé militant et se mobilisent pour la première fois. Issus en grande majorité des classes populaires stabilisées et des classes moyennes précarisées, ils élaborent des manières originales de contester, non seulement par l'occupation durable des ronds-points, mais aussi, par exemple, par des formes moins organisées et non « autorisées » de manifester en centre-ville, les samedis après-midi.